Je ne supporte pas cette horrible phrase qu’on voit souvent: « la grossesse n’est pas une maladie! ».
Cette phrase ne sert à rien. Elle véhicule un message jugeant envers les femmes enceintes, en minimisant les effets de la grossesse sur notre corps.
Car si être enceinte n’est pas considéré comme une maladie légalement, cela ne veut pas dire qu’être enceinte ne rend pas malade.
Parlons de vous d’abord
Si l’on fait la liste des symptômes et autres maux que les femmes enceintes peuvent vivre aux différentes étapes de leur grossesse, on constate que cela correspond à des symptômes que l’on ne minimise pourtant pas lorsqu’ils sont liés à une maladie.
Ce n’est donc qu’une question de définition et pas de vécu.
Alors j’insiste, prenez soin de vous et de votre bébé. Ménagez-vous, reposez-vous. Si besoin discutez avec votre gynécologue d’une diminution de votre taux.
Tout cela vous permettra de rester en bonne santé, de soutenir le bon développement de votre bébé et de poursuivre votre activité professionnelle plus longtemps.
Pour votre bien et celui de votre enfant ne laissez personne vous mettre en danger. Si besoin:
- retournez voir votre gynécologue ou votre médecin généraliste, réfléchissez ensemble si un certificat d’incapacité de travail est nécessaire pour vous protéger selon ce que vous vivez (mobbing, burnout, nausées, vomissements, vertiges, etc.)
- prenez contact avec l’inspection du travail de votre canton pour connaître vos droits et demander si votre situation est normale/acceptable du point de vue légal
- prenez contact avec moi ou un autre spécialiste de la santé au travail pour connaître vos droits, être au clair sur les dangers à votre poste de travail et sur la nécessité de mettre en place des mesures de protection
Parlons ensuite de votre entreprise
Votre hiérarchie est aussi gagnante à ce que vous restiez en bonne santé et continuiez à travailler pendant votre grossesse. En adaptant vos activités et vos conditions de travail rapidement, travailler reste possible pendant la grossesse.
Plus vous resterez active professionnellement dans de bonne conditions, mieux le retour au travail se passera ensuite.
D’autre part, plus votre grossesse se passera bien et plus vous aurez encore d’énergie pour accueillir votre bébé, meilleures seront vos chances de reprendre ensuite le travail dans de bonnes conditions.
Vraiment, tout le monde gagne à prendre soin de vous, alors ne laisser personne vous faire culpabiliser.
Exigez du respect de la part de votre hiérarchie et de vos collègues. Vous y avez droit.
Rappelez-leur, si besoin, qu’ils ont tous une maman et qu’ils ont tous probablement eu des femmes enceintes dans leur entourage.
Auraient-il aimé qu’on leur fasse des remarques, qu’on les malmène, qu’on les exposes à des substances susceptibles de nuire au bon développement du bébé, etc?
Rappelez-leur qu’ils ont un jour été ce bébé qui mérite d’être protégé.
Selon la situation cherchez du soutien auprès de:
- Vos proches
- Vos collègues
- Votre hiérarchie
- Les ressources humaines
- Votre gynécologue ou votre généraliste
- L‘inspection du travail
- Un spécialiste santé au travail comme moi ou un autre
Si votre état de santé se détériore ou si vous n’êtes pas respectée au travail, signalez-le au plus vite à votre gynécologue ou votre généraliste et ne minimisez pas.
Vous avez besoin de garder de l’énergie pour votre grossesse, votre accouchement, votre postpartum, etc. Alors prenez soin de vous et ne vous oubliez pas pour les autres. Cela ne vaut pas la peine et personne ne vous dira merci.
Si besoin, une baisse de taux en fin de grossesse vous permettra de ne pas arrivée épuisée à votre accouchement.
Cela vous permet aussi de travailler plus longtemps et de permettre une bonne transition avec votre remplaçant-e ou avec le reste de l’équipe.
Le besoin de réduire le taux, dépendra de votre activité et de votre santé bien sûr. Mais ne vous mettez pas dans le rouge.
Dites-vous bien que vos collègues ne culpabilisent probablement pas pour leurs absences pour service militaire, arrêt suite à un accident survenu lors d’un loisir à risque ou à une maladie liée par exemple à une mauvaise hygiène de vie. Alors le « tu as voulu un enfant, tu assumes », qu’on entend ou qu’on ressent parfois, n’a pas lieu d’être et vous pouvez vous déculpabiliser.
Vous êtes en train de créer une nouvelle vie, c’est la chose la plus belle, exigeante et complexe que notre corps puisse faire.
En vous respectant et en vous protégeant votre hiérarchie est gagnante car elle garde votre motivation, votre confiance et votre loyauté. Elle est gagnante car vous pourrez travailler plus longtemps et plus efficacement que si elle vous usait en négligeant les mesures de protection.
Finalement parlons de la société
On n’entend parfois que faire des enfants est un acte égoïste, une décision personnelle et donc qu’il faut ensuite assumer…
A mon avis cela est tout simplement faux!
La société en général a besoin des générations futures! Elle a besoin de leurs impôts, de leur cotisations sociales, de leur participation aux retraites des anciens et à leurs soins.
Il est dans l’intérêt de tout le monde que les femmes puissent avoir des enfants sereinement, si elles le souhaitent, sans se sentir exclue du monde du travail.
Car l’économie, l’industrie, les employeurs qui se plaignent que les grossesses compliquent leur gestion… oublient que sans enfant... pas de main d’œuvre, pas de consommation… pas de bénéfices, pas de croissance…
L’économie et la société ne peuvent plus se passer de la force de travail des femmes. Et en même temps, elles ne peuvent pas se passer des enfants que l’on met au monde.
Alors ne nous laissons plus écraser par toutes les injonctions contradictoires que nous recevons. Relevons la tête et répondons avec assurance que nous n’assumerons rien, car devenir parent n’est pas un choix égoïste mais un choix nécessaire.
Avoir un enfant c’est un choix que l’on fait à deux. Pourtant tout le monde félicite le 2e parent… et fait des reproche à celle qui porte l’enfant.
Là aussi, ne portons pas un choix que nous n’avons pas fait!
Dans la grand majorité des cas, on ne peut pas choisir dans le couple qui va porter l’enfant. Même si la femme n’en a pas du tout envie et que l’homme en rêve… on ne peut pas choisir d’être enceinte! Pour certaines d’entre nous on le subit même douloureusement.
Pensez-y la prochaines fois qu’une personne vous dit de ne pas vous plaindre car vous devez assumer votre choix, … VOUS N’AVEZ PAS CHOISI D’AVOIR UN UTÉRUS!
Et des autres femmes
Les femmes en générale gagnent aussi à ce que leurs consœurs puissent travailler plus longtemps dans de bonnes conditions. Car moins « engager une femme » représentera un « risque financier » pour les entreprises, plus les inégalités de genre diminueront.
Je suis convaincue que c’est possible si on fait les choses dans le bon ordre et avec toutes les informations en main et en maintenant le dialogue.
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